EPISODE 3
Utilisation de RePhase pour la correction de phase et d’amplitude :
Une fois l’exportation des mesures REW réalisée, vous pouvez lancer le logiciel RePhase (sous Windows).
Nous entrons dans la phase de correction proprement dite et l’objectif sera ici de corriger d’abord la phase de chaque voie, (ie de chaque enceinte), et ensuite de corriger, (si vous le souhaitez, car ce n’est pas obligatoire), la courbe d’amplitude pour que la réponse globale de votre système soit conforme à vos objectifs.
Les opérations commenceront donc par un premier ajustement de la phase, puis de la réponse en amplitude, et se terminera par une vérification que la phase n‘a pas bougé pendant la correction d’amplitude.
Pour ce faire, dans RePhase, faites File/Import Measurement… ou, plus simplement, faites glisser la première mesure (par exemple PhaseEnceinteGauche.txt) sur la fenêtre de RePhase.
RePhase va alors afficher cette mesure (nota : il sera surement nécessaire d’ajuster les échelles pour que les affichages soient visibles, par exemple en mettant -80db dans la case ‘Gain offset’ (sur l’onglet Measurement) pour caler la mesure qui a été prise dans REW à 75 ou 80dB, vers le 0db de RePhase, sinon on ne voit rien ).
Nota : Les données importées dans RePhase (phase ou amplitude) sont seulement des aides visuelles pour définir les corrections que l’on va vouloir appliquer, mais elles n’entrent pas dans les calculs effectués. On peut donc manipuler les échelles d’affichage et faire les mesures REW au niveau (dB) que l’on veut, cela n’a pas d’impact sur les calculs effectués par RePhase.
Vous devriez obtenir un affichage de ce type :
Correction de la phase
La première opération consiste à corriger la phase.
Il est ici très utile (mais pas indispensable) de connaître les filtres passifs de vos enceintes (fréquences de coupure et pentes) et donc ne pas hésiter à regarder les documentations disponibles !
Si vous connaissez les filtres passifs utilisés par vos enceintes, vous pouvez utiliser ces informations et renseigner les données dans l’onglet ‘Filter Linearization’.
Sinon, vous pouvez essayer de deviner en vous appuyant sur l’endroit où la phase varie le plus.
Ici, un filtre de 36db à 150Hz permet de corriger la première rotation dans les graves.
Par exemple : sur les Giya G3 (4 voies + évent bass reflex), les fréquences de coupure sont 220Hz, 880Hz, 3500Hz à 24dB de pente, et l’évent est estimé calé à 32Hz avec un Q Standard. Il suffit donc de rentrer ces valeurs pour que la phase soit déjà bien plus linéaire.
Sur les Thema (2 voies + évent bass reflex), la fréquence de coupure est à 2800Hz avec une pente inconnue, mais en mettant 24dB de pente, on se rend compte que la phase devient très linéaire et qu’un simple ajustement permet de la rendre plate très facilement (contrairement aux Giya où la linéarisation dans le grave est un petit challenge !).
Ensuite, il faut aller dans l’onglet ‘Parametric Range EQ’, mettre le range à 180 degrés (pour avoir plus de latitude de correction) et jouer avec les curseurs pour finir d’ajuster la phase (avec un peu de patience et d’habitude c’est assez facile ).
Et on peut affiner éventuellement les réglages en ayant recours à des niveaux plus détaillés en rajoutant des ‘Bank’ et en sélectionnant des ‘Preset’ au 1/3 d’octave, par exemple (mais la Bank 1 suffit généralement).
Enfin, on peut, à loisir, modifier la fréquence précise à laquelle un curseur intervient, ainsi que la largeur d’intervention en agissant sur les paramètres Q et Hz.
Voici à quoi l’on arrive après quelques opérations.
Il faut procéder ainsi pour chacune des voies. Le niveau d’ajustement de la phase est laissé au libre choix de chacun. Il est tout à fait possible d’atteindre une phase quasiment totalement linéaire de 20 à 20000Hz. Est-ce souhaitable et est-ce positif à l’écoute, ce sera à chacun d’en décider.
RePhase permettant de tester autant de réglages que l’on souhaite, il parait tout à fait concevable d’en trouver un qui répondra à ses attentes.
Correction de l’amplitude
On fait ensuite glisser sans toucher aux réglages de phase, la mesure de l’amplitude de la voie correspondante sur la fenêtre de RePhase. On voit que la phase devient erratique, mais ce n’est plus le propos, car on va seulement s’intéresser à l’amplitude sans plus toucher aux réglages de la phase.
L’objectif est ici d’utiliser les curseurs de l’onglet ‘Parametric Gain EQ’ pour modifier la courbe selon vos désirs. Voici ce à quoi l’on peut aboutir. Vous noterez que nous avons évité de recourir à une correction positive en amplitude pour ne pas prendre de risque de clipping par la suite. C’est un parti pris. On peut aussi égaliser en augmentant l’amplitude.
Dans ce domaine, la modération semble de rigueur et on évitera autant que possible de corriger ailleurs que dans le grave (sauf nécessité).
A noter qu’il ne faut pas hésiter à jouer avec les différents paramètres dont le Q qui définit la largeur d’action de la correction (Q élevé = bande d’action étroite, et Q faible = bande d’action large – Q peut varier de 0 à autant qu’on veut, mais les valeurs vraiment utiles se situent entre 1 et 25 environ).
De plus, l’égaliseur de RePhase est très souple car on peut choisir la fréquence d’action en entrant directement la valeur désirée (qu’on peut d’abord aussi repérer précisément sur la courbe avec le curseur de la souris) et faire jouer l’amplitude et le Q avec le curseur (ou les touches de déplacement, c’est très pratique ainsi) et observer ce qu’il se passe sur la courbe.
Et comme on peut utiliser plusieurs ‘Banks’, on a un égaliseur à autant de bandes de fréquences d’action que l’on souhaite, même si en pratique 1 seule Bank suffit largement la plupart du temps.
Ci-dessous un exemple de correction d’amplitude : En bleu l’amplitude initiale, en rouge l’amplitude telle que corrigée par RePhase avec les corrections de l’égaliseur. Notez que la correction a été sélectionnée en ‘linear-phase’, donc sans impact sur la phase.
Vérification de la phase (étape optionnelle) :
Il peut être utile de vérifier que les corrections d’amplitude n’ont pas affecté la phase (ce qui devrait être le cas, si on a bien sélectionné le réglage « linear-phase » sur l’onglet de l’égaliseur d’amplitude).
Pour cela, il suffit de refaire glisser la mesure de Phase correspondante et de vérifier qu’elle est bien inchangée (si c’est le cas, c’est parce qu’on y a touché par inadvertance ou bien que les corrections d’amplitude ont été faites en mode minimum-phase, mais il suffit dans ce cas, de repasser en linear-phase pour que tout rentre dans l’ordre).
Génération des fichiers impulse
Le moment est venu de générer les impulsions de correction.
On le fait en choisissant les paramètres adaptés dans la fenêtre de RePhase. Nous recommandons 65536 taps (pour ceux qui n’ont pas de contrainte de puissance de traitement – c’est à dire tous ceux qui vont utiliser un PC ou un Mac mini ou Macbook) et 32bits LPCM mono (.vaw) comme format d’impulsion.
Il convient de générer une impulsion pour chaque fréquence d’échantillonnage que l’on utilise, et ce pour chacune des voies.
A noter que RePhase vous donne, en fin de génération, l’indication du niveau maximum de correction utilisé. Si le niveau indiqué est inférieur à 0db, vous pourrez vous passer de la protection anti-clipping dans JRiver.
Pour les tests initiaux, il peut être plus efficace/rapide de se limiter à générer les impulsions en 32 bits et 48Khz, car c’est l’impulsion cohérente avec REW qui va permettre de réaliser les simulations et valider les options choisies.
Et une fois que le résultat est satisfaisant à la simulation, il restera à générer toutes les impulsions de correction pour toutes les configurations utilisées (en pratique 44.1/48/88.2 et 96 devraient suffire à la grande majorité des cas, mais il est possible de générer 176/192 et plus si besoin était…).
EPISODE 4 : SIMULATIONS DES RESULTATS AVEC REW
Pour avoir effectué quelques dizaines de simulations et mesures post simulations, nous pouvons confirmer que la simulation avec REW produit un résultat absolument remarquable et quasiment identique (même avec un lissage au 1/48 d’octave) à celui que l’on obtient avec la mesure effective du résultat via la convolution de JRiver.
Il est donc tout à fait raisonnable de procéder aux simulations jusqu’à ce que l’on obtienne un résultat jugé satisfaisant, et de n’écouter (et éventuellement mesurer) que les versions retenues, mais là aussi chacun pourra faire comme il l’entend
Pour effectuer une simulation, il faut tout d’abord importer l’impulsion générée par RePhase dans REW, en utilisant le menu File/Import Impulse Response.
L’impulsion est un fichier .wav, et est importée telle quelle dans REW.
Ensuite, on va « multiplier » cette impulsion avec celle de la mesure de la voie considérée (impulsion gauche avec mesure de l’enceinte gauche, par exemple).
Attention : Aucune vérification qu’on multiplie bien des choses compatibles n’est effectuée donc si on se trompe de fichier, on obtient des résultats amusants parfois, et incohérents toujours.
Pour effectuer cette multiplication, il suffit de se placer sur la fenêtre de la mesure de la voie considérée (disons la gauche ici), puis de cliquer sur le bouton ‘All SPL’ dans le fenêtre d’affichage de REW.
Ensuite on sélectionne les 2 courbes que l’on veut multiplier (ici la mesure de la voie gauche et l’impulsion RePhase de la voie gauche que l’on vient d’importer).
Nota : la mesure de la voie gauche doit être sans fenêtrage, sinon l’opération sera incorrecte. Donc bien s’assurer que le fenêtrage est bien enlevé (case décochée sur la fenêtre IR).
On choisit l’opération A*B, et on appuie sur le bouton générer.
Une nouvelle mesure apparaît alors, et on peut aller l’observer.
Il va d’abord falloir ramener son niveau au même niveau que l’amplitude de la mesure de la voie gauche sans correction.
Le plus simple pour cela est d’aller sur la fenêtre Overlays, et de faire afficher uniquement la mesure de la voie gauche, et la mesure calculée A*B, avec un lissage au 1/3 d’octave.
On voit que la mesure A*B est ici 102dB au dessus de la mesure de la voie gauche et il faut donc la ramener au même niveau pour faciliter les comparaisons.
Il faut la sélectionner dans le menu réglages de la fenêtre overlay, puis lui mettre un offset de -100db, puis ajuster manuellement jusqu’à ce que les 2 mesures soient à un niveau comparable (disons alignés à 1000Hz par exemple). Ensuite, cliquer sur ‘add offset to data’, pour terminer le calcul de simulation.
Il est pratique de renommer A*B en ‘Voie Gauche Corrigée’ par exemple. De fait, un bon codage de numérotation est conseillé car il est peu probable d’avoir un résultat parfait au premier coup et sans numérotation et un minimum d’organisation on est vite perdu…
Pour la correction de Giya, pda0 a réalisé 29 itérations avant d’avoir un résultat proche de celui de Trinnov ou Dirac (mais bon, beaucoup de temps perdu en tâtonnements et apprentissage du logiciel). Avec un peu de méthode, on peut arriver à un très bon résultat en 3 ou 4 itérations.
Une fois cette opération réalisée pour les 2 voies (droite et gauche), on peut simuler le comportement de la réponse avec les 2 voies en fonctionnement, en faisant simplement l’addition des 2 simulations (A+B au lieu de A*B).
Cette opération est très intéressante et instructive car on peut voir en vraie grandeur l’effet de la phase sur l’amplitude.
L’addition des 2 voies n’est pas une simple addition car si à une fréquence donnée les 2 enceintes sont en opposition de phase, ce sera une soustraction !
On peut donc observer facilement avec RePhase qu’une même amplitude sur la voie gauche par exemple mais avec une phase inversée à certaines fréquences (facile à simuler avec RePhase) produit un résultat totalement différent lorsqu’on fait l’addition avec la voie de droite.
Et le plus « impressionnant » c’est que la mesure confirme parfaitement ce comportement !
On peut noter que la simulation est exacte pour l’amplitude (quel que soit le lissage), l’impulsion et la phase mais qu’elle est un peu optimiste pour le decay, le waterfall, et surtout le spectrogramme. Mais c’est déjà pas mal !!!
Exemples de comparaison Simulation vs Mesure (Amplitude et Impulsion) :
On peut donc s’en servir, si on le souhaite, pour par exemple « contrer » l’influence d’une réflexion dans le grave, qui induit un nœud lorsque les 2 voies fonctionnent.
C’est techniquement remarquable, et ça marche (contrairement à une augmentation de l’amplitude sur un noeud qui, elle, est totalement inefficace et ne sert à rien) mais résultat à valider à l’écoute quand même (ça marche mais ça n’est pas une baguette magique hélas...) !
Néanmoins, RePhase permet de jouer avec tous ces paramètres, et les possibilités de réglage sont immenses et d’une souplesse inégalée !
Pour avoir pas mal bidouillé avec Trinnov et Dirac, RePhase est, de loin, beaucoup plus souple, mais c’est sans filet, donc toutes les âneries sont aussi permises
Prochain EPISODE :
CONFIGURATION DE JRIVER