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Version complète : Un petit peu de musique classique ...
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Bonjour, 

Imaginons simplement que les enregistrements n'existent pas et qu'on arrête de jouer du jazz pendant 300 ans, que la musique, la culture et les modes,  prennent de nouveaux chemins pendant ces 3 siècles, et qu'on retrouve les grilles et les indications données par Miles Davis aux musiciens juste avant l'enregistrement de Kind of Blue, et qu'on essaie de rejouer Kind of Blue.


On est totalement dans cette situation pour la musique de Bach ou Vivaldi et de moins en moins au fur et à mesure que l'on avance dans le temps. On dispose d'enregistrements de Richard Strauss ou de Rachmaninov en personne...

Ceux qui se sont remis à jouer du Bach après 3 siècles l'ont fait le plus souvent sans essayer de savoir "bon, c'est quoi cette musique", avec les orchestres de l'époque de taille totalement disproportionnée par exemple, et comme ils étaient connus et talentueux, ce qu'ils ont fait est devenu "une tradition réinventée".

A un moment, certains musiciens (Harnoncourt entre autres) se sont penchés sur la question de "bon, c'est quoi cette musique", par exemple en étudiant les instruments "anciens", en lisant les traités de musique de l'époque, les écrits, etc. En analysant les partitions, dans lesquelles il n'y a que très peu ou pas d'indications sur la façon de jouer, parce que il est inutile d'écrire ce qui est connu de tous au moment où on l'écrit, avec en plus des "gags" comme "piu andante" qui signifie plus vite pour Mozart, et plus lent chez les romantiques...

Que cela "plaise" ensuite à l'audition pou pas, la tradition réinventée a pris un coup dans l'aile, même si certains interprètes de cette tradition réinventée ont eu parfois des intuitions extravagantes, ou un travail personnel approfondi ou du génie.

Et puis une partie de ceux qui ont fait ce travail de recherche sur "bon, c'est quoi cette musique", sont totalement partis en vrille, en se mettant dans la "démonstration", et au lieu de "jouer la musique" se sont mis à jouer "regardez comme je suis intelligent". Cela a produit des interprétations débiles et indignes. C'est là que le surnom péjoratif de "baroqueux' est apparu.

Alors dans ce merdier, et sans aucun jugement de valeur de ma part sur les choix des uns et des autres, ou bien on écoute les interprétations qui nous "plaisent esthétiquement", ou bien on essaie de trouver les interprétations qui ont fait un vrai, travail approfondi.


Je peux donner des exemples personnels

Vivaldi par I Musici (fondé en 1952), bof par rapport à une Podger ou un Carmignola ou un Biondi.

Mozart par Bohm (1894-1981), bof par rapport à un Harnoncourt (sur instruments modernes) ou un Adam Fischer (aussi sur instruments modernes).

Beethoven et Mozart par Karajan (1908-1989), pourtant longtemps patron du festival de Salzburg, et époustouflant dans Richard Strauss,  bof par rapport à un Gardiner

Dans l'autre sens:

Don Giovanni Mozart par Giulini, 1959 ou 9ème de Beethoven par Furtwangler, 1954, restent des références que les avancées et études historiques n'ont pas détrônées.

Je ne peux que vous conseiller de lire l'entretien avec David Grimal au sujet de "l'authenticité" disponible ici: https://www.les-dissonances.eu/wp-conten..._V10-1.pdf

Et en terme de lecture plus approfondie sur le sujet, les deux ouvrages d'Harnoncourt:
Le discours musical
Le dialogue musical


Et en guise de conclusion, une triste anecdote au sujet d'Harnoncourt qui montre si c'était nécessaire que les humains ne sont que des humains.

Il avait monté un orchestre sur instruments anciens, le Concentus Musicus, avec qui, en partage avec Gustav Leonhardt, il a enregistré entre autres l'intégrale des cantates de Bach.
Dans une interview donnée en 2011 ou 2012 trouvable sur le net, Harnoncourt explique qu'il n'a jamais osé jouer avec son orchestre sur instruments anciens au Festival de Salzburg, parce que peut-être les oreilles du public du Festival n'y étaient pas prêtes, et qu'il va le faire pour la première fois au Festival 2012 avec La Flute Enchantée et son orchestre Concentus Musicus.

J'ai assisté à une représentation de sa Flute à ce Festival 2012. Je suis dingue de Mozart, dingue de la Flute, et admiratif et reconnaissant à Harnoncourt qui a largement contribué à ma formation musicale.
C'était à chier. Il a fait jouer ses musiciens sur instruments anciens avec des articulations d'instruments modernes, l'orchestre n'était pas à son aise, et comment ne pas l'être quand on doit désapprendre, cela a entrainé un inconfort immense chez les chanteurs. A tel point, que je me suis endormi  Sad

"Naturellement", les critiques ont été dithyrambiques.

Amitiés
Ta façon de voir les choses et de les dire a toujours un petit côté "rafraîchissant" Wink
C'est bien résumé.
Il a l'air très bien ce texte de Grimal.

Petite question : Ce qui te déplait chez Bohm ? les tempi ?
bien certes masi ..

Ceci dit, rien que dans le violon, dans le baroque, une Podger, Beyer, Carmignola ne sont pas les moins "marketés" et sont visibles dans les rayons.
Après c'est sûr... contre la crinière de Nemanja, les pieds nus de Kopachinskaja, ou une médiatisation dans "Prodiges", tu peux pas lutter

Le premier s'est fait pietiner dans la tribune des critiques (j'y reviens c'est mon sujet ) lors de la scénce comparative des 4 SAISONS  au profit précisément du second ...que je me suis procuré ...
....Sous le charme apparent de la nouveauté
J'ai bien aimé la premiere écoute intégrale tout nouveau tout beau ,un peu moins la suivante et plus depuis je suis revenu à mes amours vieillissant avec Karl .MUCHINGER et son STUTTGART chantant bon la musique

Reste sur la prestation du fougueus chevelu sur cet album  l'interprétation de l'œuvre faite pour lui par son ami alexandar SEDAR "SPRING in Japon " dont il a fait la premiere création mondiale ...( peut -etre la dernière )
(09-06-2017, 04:08 PM)MeloMan a écrit : [ -> ]bien certes masi ..

Ouep mais bon, les trois premiers ont une magnifique carrière et de belles ventes.
Personnellement, j'ai plus d'enregistrements d'eux que des trois suivants.

C'est comme le "locavorisme", c'est au consommateur d'influer aussi...
D'ailleurs je consomme local, la classe d'A. Beyer est à 10 minutes de chez moi Big Grin

Citation :Le premier s'est fait pietiner dans la tribune des critiques (j'y reviens c'est mon sujet )
Ouep... n'empêche que moi j'aime bien la version Carmignola ! Big Grin
Peut-être que, comme Thierry disait, ils écoutent avec trop d'attentes ou d'à priori et pas comme si c'était leur première fois !
Ceci dit, il en faut pour tous les gouts et notre chevelu n'est apparemment pas le plus mauvais des garçons, humainement parlant, ça me gêne moins que certains. Après, je n'irais pas spécialement l'acheter.
(09-06-2017, 03:27 PM)Olive a écrit : [ -> ]C'est bien résumé.
Il a l'air très bien ce texte de Grimal.

Petite question : Ce qui te déplait chez Bohm ? les tempi ?

Salut

S'il n'y avait que les tempi, où il arrive souvent que plusieurs options soient crédibles, je n'en aurais pas parlé.

Evidemment ce que je vais écrire va paraitre très violent, et c'est très facile après près de 40 ans de travail de milliers de musicologues et de musiciens à travers le monde, et le pauvre Bohm va se faire tailler un costard...

Bohm joue Mozart comme des acteurs japonais ne parlant pas un mot de français joueraient une pièce de Molière, ou comme des français n'ayant aucune connaissance du No se mettraient à monter un spectacle de théâtre No.

Il y aurait dans les deux cas les mots, mais ni les intonations, ni les articulations, ni le rythme des phrases, ni le sens.

Un exemple, la "petite" sol mineur de Mozart, devenue célèbre après le film Amadeus.
Evidemment il y a les notes chez Bohm. Est-ce que c'est "suffisant"? Cela l'était à son époque, cela ne l'est plus maintenant.

Comparaison avec Adam Fisher dont j'avais écrit une critique justement sur cette symphonie 25 que je me permets de citer intégralement ici, et où j'avais déjà parlé des "baroqueux":

Citation :Y avait-il encore besoin d'une nouvelle intégrale des symphonies de Mozart?
Entre les versions plutôt contemplatives (pour ne pas dire somonolentes ou planplan) de certains, les extravagances ridicules de certains baroqueux, et des sommets comme l'intégrale de Erich Leinsdorf, l'offre est plutôt roborative, du pire au meilleur.
Mais après la jubilation procurée par l'écoute de l'intégrale des Symphonies de Haydn par Adam Fischer, je me suis laissé aller à cliquer sur des extraits de cette nouvelle intégrale sur mon ordinateur. Ces quelques fragments m'ont conduit à immédiatement me procurer tous les albums de cette intégrale.
 
Je ne parlerai ici que de la Symphonie 25, Sol Mineur, composée à 17 ans par notre Aimé des Dieux.
Accrochez-vous à votre fauteuil. Adam Fischer et Mozart ne vous laisseront pas une demi-seconde de répit dans le premier mouvement. Ni vos oreilles ni votre esprit ne seront tranquilles. La douleur fuse de toute part et ne laisse aucun repos ni échappatoire à l'auditeur.  Comme quand on a beaucoup pleuré, le second mouvement laisse à penser que la douleur s'achève et que l'on ne pourra jamais plus pleurer. Le menuet qui suit devient macabre, cumulant la douleur associée au souvenir de la douleur du premier mouvement. Le dernier mouvement semble prier pour que la douleur cesse et que la Paix revienne.
 
On ne sort pas tout à fait indemne de cette écoute.
 
Mais Adam Fischer ne tombe dans le Romantisme de parler de "MA" douleur, il nous parle de "LA" douleur, ce qui me semble encore plus terrifiant que d'écouter quelqu'un se lamenter sur son propre sort. Ici, on est nécessairement concerné par l"universalité du propos.
Il ne tombe pas non plus dans le "travers baroqueux" où certains, hélas, ne font qu'essayer de nous montrer à quel point ils ont compris "comment c'est écrit". La violence des syncopes et des disonnances est au service de la vision de Adam Fischer, elle même au service de la musique de Mozart.
Chapeau bas Monsieur Adam Fischer. Sur Facebook, je vous aurais envoyé un milliard de "like".
 
La prise de son et le mastering effectuées par Lars C. Bruun nous placent proches de cet orchestre de chambre, et l'effet est saississant. Tous les plans sonores sont parfaitement présents et audibles, et dans la nuance souhaitée par Adam Fischer. Les coups d'archet des violoncelles ou les "cris" des cuivres sont lisibles, sans aucun artifice.
C'est Lars C. Bruun qui est aux commandes de tous les albums parus. L'unité sonore de cette intégrale est un régal supplémentaire.
Quant aux interprétations des autres symphonies, je vous laisse les découvrir, elles valent absolument TOUTES des points d'exclamation!!!








j'ai écouté quelques minutes seulement des deux vidéo, mais en fait dès les premières secondes c'est dingue la différence entre les deux interprétations.

bon attention je déboule parmi vous les spécialistes de la chose et je m'exprime avec mes mots.

la version de bohm j'ai vraiment l'impression en comparaison de celle de fischer qu'il y à un problème de rythme (je sais pas si c'est le bon terme), je préfère celle de fischer même si du coup j'aimerais quelques chose entre les deux peut-être ! merde c'est pas simple. c'est normal c'est Mozart, ya du niveau ! Wink

perso j'en suis à 7 version de son requiem et j'en ai surement pas fini avec cette affaire ! Tongue
Utilise tes mots à toi! C'est très bien comme ça. Tu aurais parlé de groove, ça aurait collé aussi  Wink

Pour le requiem, si tu veux une version plutôt lumineuse et du côté de l'espoir, écoute Suzuki.

Pour la version la plus noire et désespérée que je connaisse, écoute Guttenberg. A encore moins écouter si on a le moral dans les chaussettes. 

Pour une version très opératique, qui s'est faite descendre par la critique bien pensante à sa sortie, écoute Currentzis. J'ai un gros gros faible pour cette dernière. J'avais écrit une critique à son sujet. Et nom de Zeus, quand on joue le "jour de colère" qui est liaison avec l'apocalypse, il y a de la colère et de l'emportement, et pas un cocktail de prozac-valium-temesta comme chez Bohm  Dodgy

Si tu veux écouter un enregistrement fait dans un hall de gare, écoute Laurence Equilbey, jusqu'à 6-8 secondes de réverbération à la prise de son. Débile de choisir des endroits pareils pour jouer ou enregistrer (Chapelle Versailles).

Pour une version rigoriste et un peu chiante, Muti. 

Bon, j'arrête là  Big Grin
Merci Thierry pour la piste Fischer, j'ai plusieurs versions aussi, mais à vrai dire je les ai tellement écoutées gamin (les plus connues, aucune idée de la version...) que je ne les écoute plus vraiment.

Dans le requiem, j'ai beaucoup écouté Christie et Marriner à une époque.
J'aimais bien le côté très enlevé du Kyrie et du Dies Irae.
Je n'arrivais pas à écouter des versions plus lentes pendant longtemps.
Je m'arrêtais assez souvent après le tuba mirum (edit : avec un petit saut sur le confutatis quand même)

Et effectivement Bohm est complètement dans l'inverse. Mais je comprends ce qu'on peut y trouver. On attend tellement les notes que c'est l'effet "skin orgasm" quand elles arrivent enfin Big Grin

Je vais essayer Currentzis, merci !
merci thierry pour tes conseils, n'hésite pas à les renouveler pour le requiem, je suis preneur. Suzuki je l'ai en SACD, j'ai également sir colin davis en sacd, en cd j'ai Karajan en 87,uwe gronostay, j'ai ricardo muti également et je ne me rappel plus les deux autres, je te dirais.