Bonjour à tous,
Comme indiqué sur le fil de mon installation, j’ai eu le plaisir d’accueillir à la maison, François Crétollier, qui est le fondateur et concepteur de la société De Lucia. François a conçu une enceinte active (amplifiée et avec traitement du signal) haut de gamme qui sera bientôt commercialisée.
Il recueille actuellement l’avis d’audiophiles sur sa dernière version prototype/pré-série, et comme il m’a proposé de les écouter chez moi à l’occasion d’un passage en région parisienne, nous avons passé une après-midi entre passionnés de musique et de technique
Ces enceintes sont très réussies esthétiquement et sont très faciles à loger. Elles font 1.07m de haut pour 28cm de large et 23,8cm de profondeur. Mais leur forme évasée leur donne un petit air de sculpture moderne qui devrait faciliter son intégration dans n’importe quel salon.
Elles reposent sur le sol via 3 pointes métalliques posées sur des coupelles en aluminium, et une sorte de croix en aluminium vissée sur la base de l’enceinte garantit une stabilité impeccable.
La version que nous avons écoutée est encore un prototype qui n’a pas la finition de la version qui sera commercialisée mais je la trouve déjà très réussie, même si en l’occurence les 2 enceintes n’avaient pas la même essence de bois sur la face avant, et qu’il y avait encore quelques ajustements à peaufiner. Mais ce sera sans aucun doute un très beau produit.
Je n’ai pas beaucoup de détails sur la technique mise en oeuvre mis à part le fait qu’il s’agit d’une enceinte 3 voies active avec DSP. Les 3 HP sont dans un coffret clos entièrement en aluminium pour assurer une rigidité parfaite (à la façon Magico), mais on ne voit pas ce coffret car il est intégré dans le corps de l’enceinte qui n’est donc qu’une sorte d’habillage pour l’esthétique !
On branche évidemment chaque enceinte sur le secteur et il faut leur envoyer un signal analogique. On les relie donc à un préamplificateur ou à un DAC à sortie variable via une liaison XLR exclusivement.
Comme mon système est basé sur un ampli Devialet D440, j’ai simplement configuré l’un des deux D220 afin de pouvoir l’utiliser en mode DAC+préampli uniquement, et on a utilisé un câble RCA->XLR apporté par François afin de pouvoir le connecter aux enceintes.
Branchement assez simple finalement et inutile d’utiliser le 2ème Devialet puisque la partie ampli est dans les enceintes, donc aucun besoin d’être en double mono coté DAC et préamplificateur.
On a placé tout simplement les enceintes au même endroit que les Giya (qu’on a poussé sur le coté pour l’occasion) et réglé le pincement selon les recommandations de François (soit beaucoup moins pincées que les Giya).
On a d’abord écouté les Giya histoire de familiariser François avec mon sous-sol et mon système, mais on est rapidement passé sur les De Lucia puisque c’était quand même le but de l’affaire.
Il faut noter que c’est extrêmement confortable de pouvoir écouter ainsi chez soi, dans un environnement qu’on connait parfaitement, avec sa base musicale habituelle, et la même électronique et source sur lesquelles on a forcément des références précises.
Et comme on est resté au sous-sol quasiment 5 heures, on a pu écouter pas mal de choses différentes, et notamment tous mes morceaux de référence que je connais par coeur maintenant.
Ceux qui ont suivi le fil de mon système savent que ma pièce en sous-sol n’est pas facile pour les enceintes qui descendent dans le grave puisqu’il y a une résonance à 38Hz qui nécessite une correction numérique même si l’ajout de basstraps à membrane a bien atténué le problème.
Nous avons cependant écouté sans correction numérique et sans mesurer quoi que ce soit, histoire de ne pas avoir de biais intellectuel pendant les écoutes.
Ce qui m’a immédiatement frappé avec ces enceintes c’est la qualité des voix. Le rendu est tout simplement exceptionnel, avec une chaleur et une présence qui est remarquable. On a écouté tous les styles depuis l’opéra jusqu’à ACDC, en passant par le jazz, la variété française, le rock, l’électro, etc… et à chaque fois, j’ai été séduit par le rendu des voix, que j’ai trouvé meilleur que sur mes Giya, et pourtant ça ne marche pas mal du tout sur mon système !
A vrai dire, ces enceintes me rappellent le rendu obtenu avec les Leedh E2 que j’ai pu écouter à de nombreuses reprises et sur différents systèmes de collègues audiophiles mais aussi chez moi avec un Devialet D200, il y a 3 ans.
Tout comme avec les Leedh (ou les Giya qui sont excellentes sur ce plan également), on n’a aucune sensation de boite, et la position des enceintes est totalement indétectable.
Par ailleurs, l’image est très précise avec une focalisation, une stabilité et une profondeur cohérente avec l’enregistrement. En fait, c’est la meilleure image avec celle des Leedh E2 que j’ai pu entendre à ce jour. Les Giya avec la correction numérique font aussi bien à vrai dire, mais il leur faut la correction numérique car dès qu’on la déconnecte, on a un léger flou qui apparait et on perd en précision et un peu en stabilité.
Cette qualité d’image est vraisemblablement due au parfait alignement temporel des 3 HP permis par le DSP (ce que confirme la mesure, car on a quand même mesuré avant de tout débrancher, quand même !
).
Sur les Leedh c’est également le cas par conception de l’enceinte, et sur les Giya, on y arrive aussi mais avec l’aide de la correction numérique
Pendant toutes les écoutes, je n’ai pas cessé de me poser des questions sur l’extension dans le grave, sans savoir dire si c’était mieux ou moins bien que sur mon système. Sur certains morceaux il me semblait percevoir que ça ne descendait pas autant que sur les Giya et pourtant sur les morceaux d’orgue ou sur le temps passé de Jonasz, tout est bien là avec du poids et de l’extension (et même un peu trop d’ailleurs à certains moments).
Ce qui est certain c’est que le grave est tendu, net et bien articulé. Ce qui m’a quand même intrigué car dans cette pièce, sans correction numérique ça me paraissait surprenant. Du coup, j’imaginais que l’enceinte ne descendait pas très bas et que la pièce boostait l’extrême grave de façon plutôt appropriée en l’occurence.
A vrai dire, et après avoir vu les mesures, cela aurait valu la peine de re-écouter ces enceintes dans mon sous-sol avec une légère correction numérique dans le grave, car il apparait que la réponse en amplitude est parfaitement plate jusqu’à 25Hz et que par conséquent la pièce ajoute un boost significatif, tout comme sur les Giya. Il est très frappant d’ailleurs de voir que la réponse amplitude est quasi superposable à celle des Giya avec une extension plus bas dans le grave (le niveau des Giya commence à baisser à partir de 30Hz dans cette pièce, alors que les De Lucia gardent le niveau 5Hz plus bas encore !).
Ce qui est certain c’est que même sans correction, tout est resté parfaitement écoutable alors qu’avec les Giya c’est bien meilleur avec un peu de correction numérique, mais bon je suis habitué aux Giya et j’ai étudié leur réponse dans cette pièce en long en large et en travers...
Sans doute avons nous aussi écouté un peu moins fort qu’à mon habitude mais c’est peut-être parce que ces enceintes le permettent. En effet, les Giya ont besoin de jus pour s’exprimer complètement, et les De Lucia m’ont paru plus intéressantes à bas niveau (mais est-ce un effet de l’absence de correction numérique et du boost induit dans le grave qui donne cette impression ? On ne pourrait le savoir qu’en corrigeant numériquement et en re-écoutant ainsi).
Coté timbres, ces enceintes sont irréprochables avec beaucoup de variété et de subtilité. En fait, elles font jeu égal avec les Giya, mais encore une fois, c’est souvent aux Leedh E2 que je pensais, car le rendu me semblait très proche du moins en comparaison avec ma mémoire… Sur le rendu des voix, j’ai aussi pensé au coté addictif des Harbeth P3esr qu’on retrouve ici, et c’est franchement très convaincant.
Et ce qui montre que rien n’est facile quand on s’appuie uniquement sur ses oreilles, j’aurais parié que l’extension dans l’aigu était moindre que sur les Giya, car le rendu est un poil plus mat, mais la mesure indique exactement le contraire ! La réponse des De Lucia au delà de 200Hz est plate et superposable à celle des Giya mais ne commence à chuter qu’au delà de 15Khz alors que les Giya commencent à descendre doucement à partir de 10Khz.
Personnellement, je n’entends plus au delà de 12Khz (privilège de l’âge
), mais il est probable que cela joue sur l’équilibre général du rendu et qu’on entende malgré tout des différences liées à cet écart.
Toujours est-il que ce rendu subjectivement plus mat, qui contribue sans doute au charme supérieur des voix, ne se fait pas au détriment de la transparence. Il ne manque aucun petit détail qui fait la différence pour recréer l’ambiance de l’enregistrement et l’illusion du vrai. Quoi qu’en pensent les détracteurs des Devialet, ces derniers sont exceptionnels en la matière et les De Lucia en tirent un excellent parti également.
En poursuivant la comparaison avec les Leedh E2 puisque j’ai trouvé que c’était à elles que les De Lucia me faisaient le plus penser, il est cependant certain que l’extension dans le grave est supérieure sur les De Lucia. Il faut ajouter aux Leedh E2 leur caisson de basses pour obtenir le même niveau. Et coté dynamique, il m’a semblé que les De Lucia avec leurs amplis intégrés faisaient également un peu mieux (en tous cas mieux que ce que j’avais pu entendre chez moi avec un Devialet en amplification) mais bon ce n’était pas une comparaison directe, et la mémoire n’est pas infaillible.
En comparaison avec les Giya par contre, (et j’ai re-écouté après le départ de François), c’est clair que les De Lucia sont un peu en retrait, mais les Giya sont excellentes dans ce domaine…
En résumé, je dois dire que j’ai été vraiment séduit par ces enceintes. Elles sont très faciles à intégrer dans un salon tant du point de vue esthétique qu’encombrement (le WAF est très élevé - avis à tous ceux qui négocient avec leur partenaire pour un système dans le salon
).
Et au niveau qualitatif, on touche au très haut de gamme avec une facilité de mise en oeuvre exceptionnelle puisqu’on n’a pas à se préoccuper de la partie amplification. Il suffit d’ajouter un bon DAC réseau à niveau réglable et c’est parti pour la musique !
Sur les critères habituels audiophiles, on peut dire que c’est magique sur les voix, excellent sur les timbres (mais niveau du grave à surveiller dans les pièces difficiles, même si celui-ci reste très articulé), dynamique très bonne, transparence exceptionnelle, image 3D ultra-cohérente, précise et stable. Bref, ça fait partie des enceintes qu’il sera important d’écouter avant tout achat dans cette gamme de prix (et au dessus) dès qu’elles seront commercialisées !
Evidemment, elles ne sont pas données puisqu’elles devraient être commercialisées dans une gamme de prix entre 15000 et 20000€ si j’ai bien compris, mais comme on n’a plus besoin d’ampli, et compte tenu du niveau de performance obtenu, ça va venir chatouiller pas mal de références à pas de prix… (les Leedh E2, les Giya et bien d’autres sont bien plus chères et il leur faut un ampli !).
Coté réserves, mais c’était encore un prototype, on a réussi à faire talonner le HP de grave sur certains morceaux et à des niveaux sonores au delà du raisonnable (le temps passé réglé bien trop fort par inattention notamment). C’est un sujet déjà connu de François, et il travaille sur un réglage du DSP qui évitera ce genre de désagrément sur les versions de série.
Bon courage à François pour la suite de son projet et tous mes voeux de succès pour cette nouvelle marque d’enceintes françaises fabriquées dans la région de Grenoble ! On attend les versions de série avec impatience !
Liste approximative des morceaux utilisés pour ces écoutes: