A noter un essai du Morpheus dans le dernier numéro d’audiophile magazine:
https://audiophile-magazine.com/wp-conte...ine-N9.pdf
De mon coté j’ai entendu le Morpheus en situation et j’en ai une une bonne impression, neutralité, pas de signature sonore prononcée comme pour la plupart des dacs habituellement rencontrés, le Morpheus me semble une option à écouter, mais qui aura aussi certainement les attributs de son grand frère Pasithea qui demande à composer avec sa neutralité pour en découvrir les qualités.
De mon coté j’ai pu essayer le Pasithea qui vient de partir après une semaine d'essais divers. Assez pour cerner le matériel, pas assez pour en capter les facultés dans la meilleure optimisation possible bien entendu, mais c’est déjà très intéressant et je remercie chaleureusement l’importateur Stefaan de Musikii pour sa confiance en ayant accepté de me prêter ce dac.
Une petite playlist dédiée du moment ayant participé aux écoutes (non exhaustive):
http://open.qobuz.com/playlist/8796875
Le Pasithea est un dac R2R NOS basé sur des puces de conversion industrielles 16bits installées sur des cartes enfichables, les modules SDA, version 2 pour le Morpheus, version 3 pour le Pasithea, ici à raison de 4 puces par module, et 4 modules par canal soit 16 puces de conversion par canal utilisées pour moitié sur 12 bits en mode différentiel avec en sortie des FPGA qui réunissent les 2x12 bits pour sortir un signal 24bit propre comme un sou neuf, sans distorsion, exploité par des AOP. Le contrôle de volume sonore est assuré sur 60db par la tension de référence des étages de conversion donc réputé sans perte notable. Les sorties XLR et RCA bénéficient du même traitement qualitativement, avec de par la conception des étages de sortie un petit avantage d’impédance aux sorties XLR (16ohm contre 100 ohm en RCA). Cela a son importance car nous n'avons pas tous des amplifications symétriques ou exploitant correctement un signal symétrique. Je pense en particulier à mon Kinki EX-M7 utilisé pendant cette semaine de tests, qui jette purement et simplement l'alternance négative du signal xlr à la masse donc pour moi inadapté à mon Tambaqui par exemple, et cela s'entend un peu quand on place des transfos désymétriseurs corrects entre le Tambaqui et le Kinki Ex-M7... je n’ai pas essayé les transfos désymétriseurs sur le Sonnet, un oubli, on ne peut pas tout tester…
J'ai commencé mes essais dans le bureau, face à mon historique Ayon Skylla2 (2 puces R2R PCM 1704K par canal en mode différentiel avec étage de sortie à tubes 6n30P-dr, contrôle de volume numérique) et mon dac/préampli Nuprime DAC9 transistorisé basé sur une puce AKM AK4490 delta sigma. Pour l'ensemble des essais je suis resté, ou suis revenu rapidement, à mes cables de modulation RCA Purist Audio Design Strumento qui se sont avérés les plus adaptés à ce système, et au Pasithea en particulier. Le bloc Kinki en amplification sur les Marten Duke2 via un cable HP Ocellia. Secteur diy basé sur du multibrin cuivre cryo dans un cas, des monobrins alliage argent or Mundorf de l'autre, ou cable de base. Pour coller tout le monde dans les mêmes conditions, Lumin U1mini sur alim linéaire SR4t Paul Hynes en usb (Entreq) ou AES (Bibacord), et sur la fin 3Dlab Nano Player signature de dernière génération sur alim Uptone en numérique AES et sortie analogique pour comparer.
Je sortais du « rodage » du Kinki que j'ai laissé tourner sur le Nuprime, et le passage au Pasithea m'a surpris tant sa neutralité contraste avec les petites frasques du Nuprime qui surjoue en comparaison, gonfle un peu tout, sature les couleurs tonales mais avec une limite de crédibilité, de variété vite atteinte. Le Nuprime est passe partout, plutot agréable, vivant, le Pasithea se comporte comme si on avait enlevé tous les étages actifs du Nuprime, l'aspect un peu analytique et les systématismes de la puce delta sigma et qu'il ne restait qu'un grand panorama sonore plus en recul, plus large et haut, plus respectueux de la dynamique fine et de l'ambiance sonore du lieu de prise de son. On perd également des crispations dont on avait pas trop conscience car le Pasithea est totalement silencieux en comparaison, totalement dénué de raideur, c'est fin, lisse et en même temps cela reste vivant quand même, et sur les bons enregistrements le sentiment de naturel et richesse tonale est là comme rarement. Le Nuprime donne plus de gain ce qui artificialise la restitution , pousse trop fort si on met son volume à fond pour controler le volume depuis le Lumin, le Pasithea est un atout de ce côté avec un gain raisonnable et qui reste ajustable à la baisse si besoin.
Face au Ayon, l'on est moins perturbé par les timbres, des similitudes apparaissent, mais le Pasithea apparaît bien plus ouvert dans l'espace, mieux différencié coté dynamique, moins compressé et sa grande fluidité, cet espace sonore propre et lisse montre en écoute de proximité les limites de fluidité de l'étage à tube du Ayon. Passons à de belles voix bien captées et le Pasithea montre que derrière son apparente restitution lisse se cache la faculté de faire ressortir l'émotion des voix par la pureté sonore qui ressort de ce dac, qui pose la modulation sans aucun stress, sans aucune aspérité. La limite est que les conditions doivent être réunies pour ne pas trouver le résultat assez froid ou trop lissé, la signature sonore recherchée est l'absence de signature sonore c'est évident, quand le simple fait de choisir une puce AKM ou Sabre enferme peut être dans une typologie sonore plus marquée, donnant un certain relief à la restitution qui n'est pas présent ici sur le R2R NOS. Si il y a une signature sonore, qui accentue peut être le coté propre mais presque un peu « trop » neutre, j'aurais envie de la placer dans les AOP qui restent des éléments actifs en sortie de conversion qui me semblent souvent limiter un peu la richesse, saturation des couleurs. Difficile sans avoir comparé en face mais j'ai l'impression que le Morpheus dans son compromis un peu moins transparent doit être plus versatile, un peu plus dense et pardonnant avec les enregistrements dont la captation n'a pas pu prendre toute la richesse tonale des voix et instruments en présence.
Un passage chez PDA0 dans la semaine était une bonne occasion pour mettre le Pasithea et le Tambaqui un moment en face à face sur le M7. Ce ne fut pas une franche réussite car il y avait une sorte de cumul entre les caractères du dac et des enceintes Apertura, le coté un peu clair et surtout lissé du ruban (je préfère les AMT ?) avec le recul posé et contemplatif du Pasithea, et la liaison XLR Coincident et le cable secteur qui allaient dans le même sens... aie, mariage loupé ! C'était mieux avec le RCA Strumento et le cable secteur habituel de Philippe, moins lissé et plus riche coté timbres mais cela va nous conduire surtout à la grande différence d'écoute procurée entre le Pasithea et le Tambaqui, qui relève vraiment d'un choix d'écoute et d'associations. Le Tambaqui rapproche la scène et donne du relief, plus de corps et des couleurs plus saturées à la restitution, au prix d'une perte du panorama sonore offert par le Pasithea. Le Tambaqui est moins neutre mais plus chantant, enjoué sur les instruments qu'il rend avec du relief, le Pasithea intègre mieux les voix et instruments dans le lieu de l'enregistrement avec plus de neutralité mais perd ici une part de l'essence, du grain, du relief des instruments et voix.
On en revient dans mon salon puis mon bureau où j'ai essayé de comparer Tambaqui et Pasithea, dans les limites de mon acoustique (difficile quand on revient de chez PDA0...), sur les Aelius et les Luxman avec les Vivid G1 / cable HP Coincident puis de nouveau sur le couple M7/Marten.
Les Luxman donnent énergie et densité, une touche d'excès de chaleur et un « grain » très prononcé, ce qui convient bien au Pasithea qui privilégie un vaste panorama sonore très silencieux, propre et défini sans le moindre début d'aspect analytique. Le Tambaqui de son coté, qui est l'opposé spirituel complet du Pasithea en terme de conception je le rappelle (suréchantillonages extrèmes en vue de faire une conversion maison de type delta sigma débouchant sur un signal PWM en sortie) fait apparaître une image sonore plus en avant avec plus de densité et d'affouillement, c'est d'ailleurs trop dense avec le modulation Coincident, comme un peu trop insistant, redondant, là il vaut mieux du Grimm qui dégraisse tout çà en donnant plus de vie et de clarté.
Sur les Aelius, il y a une vraie fusion de l'ensemble Tambaqui / Coincident /Ypsilon, les Aelius sont plus neutres, affinés que les Luxman (même si ils cèdent en résolution et assise dans le bas du spectre face aux Luxman), donnent une écoute plus en recul qui compense bien la mise en avant du tambaqui, son relief supérieur au Pasithea. Là le grimm TPM en modulation devient trop dégraissé, plus ennuyeux et froid là où c'est plus une impression de richesse qui émerge avec les Luxman. La grande richesse tonale délivrée par les Aelius passe tout de même bien avec le Pasithea, plus de profondeur de scène et de recul, très beau panorama sonore et de bonnes sensations sur les voix, les ensembles petits et grands ou l’électro.
Mêmes sensations au retour dans mon bureau, avec un avantage au Pasithea qui est d'offrir un recul en écoute de proximité, une décontraction qui permet d'écouter un peu plus fort tout en captant l'essence tonale des bons enregistrements, avec cette sensation d'agrandir la pièce d'écoute. Le Tambaqui rapproche la modulation en rentrant plus dans l'analyse, la résolution du corps des voix et instruments, ce qui prend plus de place devant soi et referme un peu l'espace sonore autour des enceintes, et pousse un peu plus d'énergie dans la pièce subjectivement. Là j'ai mesuré que le Tambaqui sur le M7 n'était pas optimal en XLR et plus fin via les transfos désymétriseurs Totaldac, mais c'est aussi en lien avec le modulation Strumento RCA qui colle décidément bien à ce second système qu'il rend plus enjoué et naturel, des aspects très importants de l'optimisation pour apprécier les qualités du Pasithea et ne pas letrouver trop lisse et un peu passé coté timbres. Un petit plus si j’utilise en AES le 3dlab Nano Player Signature qui dispose d’une bonne sortie numérique, je suis moins fan de la sortie analogique du Nano qui donne netteté et énergie mais me semble sensiblement simplifier les retombées de note, lisser la modulation là où le Pasithea sait mêler volonté d’une restitution lisse et ample, en profondeur, avec une faculté à donner des timbres naturels et plus diversifiés sachant révéler le grain naturel d’une voix bien captée sans lisser le vibrato des cordes vocales, dans les bonnes conditions.
Je ne l'ai pas encore dit mais il est évident que ces deux dacs n'ont aucun souci à en découdre avec toute la complexité de la modulation, aucun souci de lisibilité et dynamique sur les grandes formations dans les deux cas, simplement un peu plus de vie et d'analyse, de saturation des couleurs avec le Tambaqui, un peu plus de recul de scène, de neutralité avec le Pasithea qui se refuse à toute exubérance ou mise sous loupe de la modulation.
Au chapitre des détails matériels du Pasithea, à noter une bonne qualité de fabrication, le boitier est rigide, bien fini. Les petits détails qui fâchent: un contrôle de volume peu précis qui un coup fait un db, ou coup deux db (amusant de constater que la télécommande controle aussi le volume du Tambaqui mais sur ce dernier le controle reste précis donc cela vient du Pasithea), le capot supérieur ajouré pour évacuer les calories mais avec des leds de toutes les couleurs sur les CI internes on a droit à un dégradé de couleurs au plafond au dessus du dac la nuit, et enfin l’écran bleu flashy avec de la latence… je comprends la philosophie de réduction des coûts mais sur un appareil de ce prix mettre un écran aussi basique est pour moi une erreur marketting et visuelle, c’est juste moche, peu fonctionnel et un écran plus qualitatif et original n’aurait probablement pas plombé le budget… voir l’écran d’un Lumin, du Tambaqui… rien de grave bien entendu, mais des pistes d’amélioration.
En conclusion, j’ai beaucoup apprécié le Pasithea sur mon second système, trouvant une synergie intéressante avec les Marten, le Kinki avec cables hp argent Monobrin Ocellia et RCA Strumento, cet assemblage permet d’éviter l’excès de propreté, neutralité un poil javellisée que l’on peut obtenir dans les mauvaises conditions, pour au contraire donner en écoute de proximité une sensation de naturel, ampleur, profondeur avec des voix superbement « normales », sans surjeu, sans surenchère d’analyse, sans mise en avant. C’est une philosophie sonore voulue, avec laquelle il faut composer en ayant conscience qu’il sera moins versatile que le Tambaqui qui lui, sans être ostentatoire non plus (il reste par exemple bien plus subtile et en recul qu’un PSaudio Directstream), propose une plus grande immersion dans le corps des instruments et voix par une analyse et relief supérieurs, une image un peu plus en avant, au prix d’un panorama sonore en profondeur moins mis en valeur, un ensemble moins neutre, un parti prix aussi conséquence de sa conception. Le Tambaqui regagne un peu de précision et profondeur avec une source externe UPNP en aes ou usb, c’est un fait aussi.
J’ai eu par le passé le premier dac Metrum Octave et j’ai la sensation avec les Sonnet d’un retour aux sources du concepteur, en allant aujourd’hui bien plus loin dans le raffinement mais avec cette même volonté de neutralité poussée, de rendu global non analytique mais intégrant mine de rien toutes les informations disponibles tout en restant assez vivant, plus que les Metrum plus récents dont le jeu m’a semblé plus agréable mais plus coloré (moins de vie, tonalité moins neutre). Un choix au final on ne peut plus individuel, bien plus dépendant des associations et signatures sonore recherchées, que de l’écart de prix en jeu entre appareils, à mon humble avis, et une versatilité qui penche du coté du Tambaqui en terme d’associations matérielles là où le Pasithea demandera d’office une validation in situ au risque que son rendu très neutre ne soit perçu comme trop froid et terne. J’ai pu entendre des enregistrements sans grande richesse avec lui, jamais crispés mais parfois comme pauvres, trop lissés mais j’ai pourtant pu, je l’assure, entendre avec lui les voix plus naturelles que j’ai entendu, dessinées avec soi dans l’espace à leur juste taille, juste recul, juste densité, et vraie émotion, mais il est un fait que cela ne sera pas offert à chaque utilisateur, à chaque transducteur du marché, ce n’est pas passe partout.
Il reste les perf des appareils tout de même à ne pas occulter, bien présentes et surclassant nettement mes deux dacs soit plus ancien soit plus bas de gamme, c’est un fait, mais oui une fois cela passé je dirais qu’avec le Pasithea l’équilibre entre composants prend une importance toute particulière, ce qui est moins le cas avec le Tambaqui.
Et indépendamment du prix (l’écart n’est pas si grand si l’on compte que le Tambaqui est aussi un streamer et un ampli casque) je suis bien certain que celui qui s’offrira l’un ne s’offrira pas l’autre et inversement, pour sa vision personnelle de ce que doit être la restitution musicale, et le système qui va avec. Je n’avais pas mon bandeau noir sur moi ni d’aide de camp pour jouer à l’aveugle mais les mesures insolentes des deux dacs (distorsion, rapport signal bruit…) collent bien avec les limites de qualité auditive des deux autres dacs, après ce fait il reste deux dacs qui pourraient difficilement être moins différents à l’écoute malgré des mesures parfaites… pour moi ces deux aspects donnent d’un coté l’importance bien réelle d’avoir d’excellentes mesures et technologies employées sur un dac, mais de l’autre ne renseignent nullement sur l’appréciation que l’on aura de leur prestation en terme de rapprochement à la réalité que l’on souhaite entendre (sauf uniformisation par une acoustique trop absorbée ou à l’inverse trop réverbérée ou trop fournie en son indirect), hélas pourrait on dire.
Cordialement, Nico.