J'ai lu la première thèse donnée en référence par Amoulsolo et c'est très intéressant, pas tellement sur les résultats obtenus qui ne font finalement que proposer et qualifier la valeur d'une méthode de comparaison "objective", mais pour montrer la difficulté de l'exercice consistant à obtenir des données et les corréler avec ce qu'on entend.
Il y a plusieurs passages que je trouve intéressants car ils rappellent quelques bases qui ne font pas débat entre scientifiques.
- L'essentiel de la distorsion provient des enceintes et du local.
- La THD et IMD ne rendent que très peu compte de ce qu'on entend (pour pas dire qu'il semble n'y avoir aucune corrélation à vrai dire)
- L'utilisation de signaux stationnaires (car c'est commode) pour faire ces mesures ne permet pas de rendre compte de la complexité de la musique.
Extrait de la page 15:
"Ces deux méthodes (THD et IMD) normalisées utilisées dans les fiches techniques d’équipement ne semblent donc pas adaptées à l’évaluation des systèmes complexes. Les autres méthodes d’évaluation présentées sont moins employées que la THD ou l’IMD pour l’estimation de la distorsion non linéaire sur les systèmes de restitution. De plus, les signaux mis en jeu dans ces types d’évaluation de la distorsion non linéaire sont des signaux stationnaires, contrairement à un signal musical essentiellement non stationnaire. Ainsi, le fait d’obtenir objectivement une valeur ou une représentation graphique ne permet pas de relier l’évaluation objective de la distorsion non linéaire avec la perception.
Ces différentes limitations révèlent trois aspects de l’évaluation de la distorsion non linéaire à prendre en considération. Tout d’abord, un système de restitution est un système dynamique extrêmement complexe qui regroupe des effets non linéaires électromagnétiques, mécaniques et acoustiques. Le deuxième point concerne le signal transmis au travers d’un système de restitution. Ce signal est, pour des conditions réelles d’écoute, loin des signaux composés de quelques fréquences. Il s’agit pour la plupart du temps d’un signal musical ou de parole caractérisé par des variations instantanées de niveau, d’enveloppe temporelle et de spectre.
Le troisième et dernier aspect concerne la complexité du système auditif humain dont les propriétés physiologiques et psychoacoustiques ne sont pas linéaires. Nous allons développer ces trois points afin de comprendre la difficulté d’évaluer objectivement l’effet perceptif de la distorsion non linéaire d’un système de restitution."
C'est intéressant de trouver ce texte dans un document à vocation scientifique et qui se propose justement de trouver une méthode permettant d'objectiver un peu mieux les différences perçues à l'oreille.
Ce que j'en retiens, c'est qu'il est illusoire de penser qu'on va pouvoir facilement caractériser "objectivement" les différences que l'on perçoit à l'oreille. La description de ce qui est mis en oeuvre pour s'affranchir des biais divers et variés et la difficulté d'analyse statistique des résultats montre qu'il n'y a probablement pas de mesure objective simple capable de déterminer à l'avance l'influence de tel ou tel paramètre (en dehors évidemment de problème massif évident, mais les matériels du commerce sont en général bien conçus et en sont affranchis).
J'ai trouvé intéressant aussi les essais effectués pour valider leur modèle d'enceinte vs enceinte réelle. Il était demandé au panel d'auditeurs d'identifier s'ils entendaient l'enceinte réelle ou l'enceinte virtuelle (en fait on leur fait écouter au casque des musiques réelles (références données d'aillleurs) enregistrées sur l'enceinte réelle dans une pièce vs ces même musiques issues d'une enceinte virutelle modélisée et simulée dans la pièce en question par convolution).
Le point intéressant est que le résultat a montré que globalement ils se trompaient souvent puisque statistiquement ça dépassait à peine pas 52% de réponses correctes (50% étant le hasard pur), mais par contre, dans le panel d'auditeurs il y avait un professionnel de l'audio (ils ne disent pas son métier réel) qui lui a trouvé les différences quasi systématiquement !
Ceci tendrait donc à montrer que la capacité de discrimination de différences est aussi un entrainement, et par conséquent qu'il est facile de ne pas entendre de différence alors qu'il y en a "objectivement" puisque certains arrivent à faire la différence !
Personnellement, la lecture de ce document m'a conforté dans l'idée, si tant est que c'était nécessaire
, que l'écoute subjective chez soi, dans un environnement qu'on connait, et sur la longueur est probablement la seule méthode qui permette de savoir ce qu'apporte réellement un matériel.
Les mesures acoustiques, d'un autre côté, sont indispensables pour l'optimisation de l'installation dans la pièce d'écoute, et donnent des informations clés sur les problèmes acoustiques induits par le couple enceintes/pièce et les solutions potentielles à ces problèmes.